Pour une transition vers des systèmes alimentaires durables en Haïti

Les problèmes économiques qui sévissent actuellement en Haïti ne permettent plus aux petits paysans de satisfaire leurs besoins et/ou ceux de leur famille. Plusieurs facteurs sont liés à cette dure réalité, notamment l'explosion démographique et la précarité des conditions environnementales (Smolikowski, 1993). La vulnérabilité de ces conditions de dégradation ne favorise plus l'utilisation des mêmes techniques agricoles que jadis. Dans un contexte o๠les populations rurales sont exposées à de fortes variations des prix des produits agricoles et climatiques, il parait opportun de consolider et de diffuser des techniques agro-écologiques complémentaires, sécurisées et sans risque majeur pour les familles paysannes, enfin robustes à long terme pour améliorer progressivement les conditions de vie de nos petits paysans. Ces nouveaux modèles de production agricole seront-ils à même de nourrir nos villes et nos campagnes et de sortir de la précarité des milliers de familles paysannes aujourd'hui exclues des marchés ? Quelles sont les conditions politiques et institutionnelles requises pour leur extension ?

En 1986, avec la réouverture des ports et la baisse des droits de douane, les prix à la consommation baissent au désavantage de la production nationale. De nos jours, l'état n'a plus le contrôle de l'agroalimentaire et de la consommation (FAO 1995) et il devient très difficile de maitriser le secteur informel. La conception néo-libérale de la sécurité alimentaire dénie en fait notre droit à la souveraineté alimentaire. Celle-ci s'entend en effet par « le droit de notre peuple à déterminer son propre système alimentaire et agricole à protéger et réguler la production agricole et le commerce du pays afin d'atteindre ses objectifs en matière de développement durable à décider dans quelle mesure il désire rester autonome, et à résister au dumping de produits venant des USA et UE sur notre marché.

Un accroissement de l'autonomie et du développement du marché reste nécessaire:
   • pour aider les fermiers à augmenter leur pouvoir d'achat
   • pour les protéger des fluctuations du prix des matières alimentaires et des variations écologiques (sécheresse, pluies abondantes).

Le potentiel des pratiques d'intégration (arachide, Moringa, haricot) dans nos systèmes de culture.

L'azote est souvent l'élément le plus limitant en matière de production céréalière. Les engrais chimiques sont rarement accessibles à nos petits paysans. Par conséquent, dans de nombreux systèmes de production végétale de subsistance, l'azote est en réalité “extrait” de la matière organique des sols, ce qui l'appauvrit. Les légumineuses (arachide, Moringa, Haricot) peuvent résoudre en partie ce problème, soit en tant qu'engrais vert dans des systèmes de culture intercalaire, dans le cadre d'un plan de rotation des cultures ou dans des systèmes agroforestiers (association Moringa+..).

Une fois les graines d'arachide récoltées, les fanes peuvent nourrir le bétail ou être enfouies. Dans ce dernier cas, le rendement de la culture suivante (maïs ou riz, par exemple) peut être bien supérieur, voire doubler, même si le rendement de l'arachide est faible. Il a été prouvé que l'introduction de légumineuses (légumineuses de couverture, pâturages composés de graminées et de légumineuses, jachère fondée sur les légumineuses ou même légumineuses annuelles) dans la rotation des cultures limitait l'infestation de plantes adventices, les maladies et les attaques de ravageurs.

Les systèmes de culture basés sur les légumineuses contribuent à préserver la biodiversité, en particulier des pollinisateurs et d'autres arthropodes, de la faune et la ?ore du sol en général, ainsi que de nombreuses espèces d'oiseaux et de mammifères qui peuvent vivre dans les paysages agricoles.

Bibliographie

- Cochet H., Devienne S., 2006, « Fonctionnement et performances économiques des systèmes de production agricole : une démarche à l'échelle régionale », Cahiers Agricultures, vol. 15, no 6, Montrouge.
- DUFUMIER M., 1986, Les politiques agraires, Paris, PUF, coll. Que sais-je ?
- DUFUMIER M., 1996, Les projets de développement agricole. Manuel d'expertise, Paris, Karthala.
- DUFUMIER M., 2002, Un agronome dans son siècle. Actualité de René DUMONT, Paris, Karthala/INAPG.
- DUFUMIER M., 2004, Agricultures et paysanneries des Tiers mondes, Paris, Karthala.

Jean-Rusnel ETIENNE,
Agronome, spécialiste de l'agroécologie
(509)43821856/339325

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